Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Pas à pas ...
17 février 2009

DE MOPTI A DOUENTZA : Du 4 au 9 décembre 2008

Nous arrivons juste à temps pour embarquer à bord du gros bateau bleu et blanc de la COMANAV qui sillonne le fleuve Niger du Nord au Sud et inversement. Contre toute attente, celui-ci part à l’heure. Nous faisons nos adieux à Mopti, ses égouts à ciel ouvert, ses rabatteurs accrocheurs et son port chaotique et grouillant dont les lumières disparaissent au fur et à mesure que nous nous enfonçons dans la fameuse boucle du Niger.

« Il n’y a pas de petites économies, dormons sur le pont. Deux fois moins cher que la dernière classe, la classe 3 »… La première nuit, alors que nous nous installons tout en haut sur le pont, un vent violent nous gèle les os et traverse la fine couverture dont nous avons fait l’acquisition pour l’occasion ; et la couverture de suivie que nous partageons nous couvre à peine les jambes.  Une nuit difficile qui a raison de la santé de Gaëlle qui commence à se tordre les boyaux au petit matin avant de pouvoir enfin se réchauffer, baignant dans le soleil matinal.  Pour le deuxième soir, changement de programme, Gaëlle s’installe dans une cabine de classe 3 à 8 lits aux côtés de 2 françaises rencontrées plus tôt ; David lui, affrontera le froid en solitaire…Emmitouflé dans sa couverture, celle de survie et une bâche plastique recouvrant le tout, il s’est enturbanné dans son chèche, un masque de nuit achevant de recouvrir la moindre parcelle de son corps ! Mais cela lui vaudra quand même une belle crève les 3 jours suivants. « Il n’y a pas de petites économies qui disaient ! ».

Le paysage qui défile est magnifique. Au petit matin, le bateau slalome à travers des bancs de hautes herbes vertes qui semblent flotter à la surface. Des villages sont installés sur les rives du fleuve qui semble être leur seule voie d’accès, ou en tous cas la plus empruntée. On se demande comment les cases peuvent être si proches de la rive sans se faire inonder en pleine saison des pluies lorsque le niveau de l’eau monte.

Le soir, une escale à Niafounké nous offre un véritable spectacle, une scène de vie débordante. Le bar du bateau a même sorti les enceintes sur le pont pour ajouter à l’agitation ambiante. Les femmes descendent à quai avec leur charge en équilibre sur la tête, elle-même en équilibre sur la planche de bois servant de pont-levis.  D’autres femmes du village sont déjà sur place et un petit marcher s’installe sous nos yeux pendant que passagers quittent le bateau, remplacés par de nouveaux arrivants. Des gamins se trémoussent sur la musique, certains parviennent à bluffer la vigilance et s’offrent une promenade à bord. Puis le petit pont-levis est relevé suite au sourd retentissement de la sirène. Un retardataire, dans une acrobatie spectaculaire, réussi à repasser par-dessus bord de justesse…

Nous arrivons aux abords de Tombouctou vers midi le lendemain après deux nuits à bord.  Alkeidi, un malien de petite taille, un peu grassouillé et qui se donne un air sérieux nous propose de nous héberger chez lui. La proposition est alléchante et nous optons pour visiter les lieux. Il nous conduit en fait chez son cousin Alidji « le long » (le grand) comme ils le qualifient ici. C’est avec un large sourire franc et sincère que celui-ci nous accueille au deuxième étage d’une petite maison en plein centre historique ; l’endroit est calme et agréable, une chambre est mise à notre disposition, l’ambiance est simple et malienne.

Après une douche au sceau qui nous décrasse des 2 jours de bateaux nous sommes fins prêts pour partir à la découverte de Tombouctou la mystérieuse. La ville n’a en fait rien d’exceptionnelle. C’est surtout une ville mythique de la route des caravanes, plantée aux portes du désert et qui a fait coulé beaucoup d’encre surtout à l’époque des explorateurs du 19ème. Nous passons d’ailleurs devant la maison de René Caillé, grand explorateur français qui a rejoint la ville à pied depuis la Guinée.  Les portes de bois sont joliment sculptées et décorées et certaines maisons sont dotées de fenêtres à l’influence marocaine.  Par endroit, des tentes touaregs installées entre les maisons accueillent des familles entières. Ce qui est surtout suprenant c’est de trouver cette ville aux portes du désert dont on devine les dunes à l’horizon. Ici on appelle « désert touristique » celui situé à 2h de chameaux et le « vrai désert », celui situé à 4 ou 5 jours de chameaux…

Chez Alidji, nous faisons la connaissance de Jean-Mar. Ce cinquantenaire français, de petite taille, cheveux blonds et longs, s’est acheté une petite maison à Tombouctou où il vit à la lueur de la bougie avec sa jeune et très jolie compagne camerounaise Adama de 30 ans sa benjamine.  Le soir, Oumar et son neveu sont là. Grand touareg mince et élancé, il flotte dans sa tenue bleue claire. Il vit habituellement dans la brousse dans la région de Gourma mais exceptionnellement à Tombouctou pour vendre ses moutons pour la Tabaski, « la fête du mouton ». Un peu naïf, il nous raconte, poussé par Alidji, comment sa première femme a « mangé sa boutique ». Alors qu’il était déscendu à Bamako 1 500 000 Frcs CFA en poche pour y ouvrir une boutique, il rencontre cette jeune fille de 15 ans « tri tri jouli », elle aussi venue de la brousse pour trouver du travail. Il ouvre sa boutique et la prend comme « bonne » dans un premier temps, avant de l’épouser car elle est vraiment « tri tri jouli ». La gourmande s’habitue à un petit déjeuner quotidien copieux composé de pain, sardine, mayonnaise et le très prisé lait de zébus. Lorsque Oumar lui annonce que les finances étant mauvaises elle devra se contenté à présent d’un Nescafé le matin, la belle ne tient pas deux jours avant de s’évaporer dans la nature avec la boutique et l’argent de la caisse ! Oumar nous raconte cette histoire dans son « petit français » sans quitter son large sourire pendant que l’assemblée que nous sommes se marre. Et une fois de plus d’en conclure :  « ti vois les femmes, c’est boucou de problèmes ! ». On l’aura compris !

C’est en compagnie de cette petite bande que nous fêtons la Tabaski le 8 décembre. Deux petits trous ont été creusés dans la petite ruelle devant la maison pour recevoir le sang des bêtes égorgées. Puis celles-ci sont dépecées sur la terrasse par un « professionnel » engagé pour l’occasion. Pour décoller la peau, il fait une entaille au niveau de l’articulation de la patte arrière par laquelle il souffle pour faire entrer de l’air sous la peau. L’animal se gonfle comme un ballon de baudruche, faisant se redresser les pattes. La bête, gonflée, est alors attachée par les pattes, tête vers le bas. En un tour de main l’animal est déshabillé ; puis l’homme opère et lui ouvre le ventre pour faire sortir les organes un à un. Le foi et le cœur sont tout de suite déposés et grillés sur le petit foyer à thé pour être rapidement picorés sur un plateau avec du sel et du poivre. L’animal est alors découpé : le dos et les gigots. Une partie est envoyée au four chez la voisine est sera servie le soir, l’autre est cuisinée en sauce sur place. C’est à ce moment qu’Adama et Jean-Marc font leur entrée triomphante, vêtus de magnifiques boubous brodés et Gaëlle est prise en main par Adama qui joue les chefs cuisinière. Installés à même le sol, chacun plonge sa main dans les différents plats et se régale sans complexe de lécher ses doigts de délice. Puis le soir même, nous faisons nos adieux à nos amis de rencontre.

Le 4x4 qui nous mène à Douentza vient nous chercher à 3h30 du matin. Le voyage commence bien : le véhicule a un problème de démarreur et il faut pousser pour le démarrer. Deux kms plus loin, il s’embourbe dans le sable… Les deux places en cabines sont occupées par 2 touaregs aisés, les 4 du milieux par des touristes. Nous, nous sommes coincés à l’arrière sur 2 banquettes qui se font face aux côtés de 6 autres passagers (au lieu de 4). Avec l’assistant du chauffeur et les 3 personnes que nous ramassons sur la route et qui font le trajet sur le toit ça fait 17. Pour un 4x4 c’est pas mal !

La route que nous empruntons fend l’horizon désertique percée d’arbres étonnamment verts qui poussent ça et là. Une longue réparation des amortisseurs nous offre une bonne sieste à l’ombre maigre d’un arbuste dénudé de feuillage.

Publicité
Publicité
Commentaires
Pas à pas ...
Publicité
Publicité